Le ministre grec des Affaires étrangères, Giorgos Gerapetritis, a affirmé que la Grèce jouait le rôle de « médiateur honnête » entre Israël et la Palestine, dans une interview accordée à l’agence Associated Press. Une prise de position qui tranche avec son absence remarquée parmi les signataires de deux initiatives majeures au sein de l’Union européenne : l’une appelant à réexaminer les échanges commerciaux entre UE et Israël, l’autre demandant l'intensification de l’aide humanitaire à Gaza.

Un appel à un cessez-le-feu, tout en votant contre l’initiative européenne

En déplacement à New York, dans le cadre des débats ouverts du Conseil de sécurité de l’ONU présidé ce mois-ci par la Grèce, Gerapetritis s’est exprimé longuement sur la situation au Moyen-Orient.

Il a réitéré l’appel d’Athènes à un « cessez-le-feu immédiat et à une aide humanitaire massive pour Gaza ». Pourtant, il n’a pas apporté son soutien à la proposition portée par les Pays-Bas et soutenue par plusieurs États membres, visant à réexaminer en profondeur les relations commerciales entre l’UE et Israël.

Soutien à la solution à deux États et à la reconstruction de Gaza

Gerapetritis a souligné l’engagement de la Grèce en faveur d’une solution à deux États et affirmé avoir mené des discussions approfondies, tant avec les responsables israéliens que palestiniens, concernant la future reconstruction de Gaza. Il a présenté la Grèce comme un acteur constructif, décrivant le pays comme un « médiateur honnête ».

S’exprimant plus largement sur le conflit, il a ajouté : « Nous souhaiterions jouer un rôle actif, mais soyons clairs : l’enjeu n’est pas de savoir qui mène la médiation, mais de faire cesser ce cauchemar. » Il a fermement condamné la mort de 1 200 personnes en Israël le 7 octobre, qualifiant les actes du Hamas d’« absolument inhumains », et dénoncé la prise d’otages toujours en cours. Ce n’est qu’ensuite qu’il a mentionné les 53 000 morts palestiniennes rapportées par les autorités locales – pour la majorité des femmes et des enfants – déclarant : « Ce qui se passe actuellement au Moyen-Orient est tout simplement intolérable. »

Jeudi, il présidera une session du Conseil de sécurité de l’ONU consacrée à la « Protection des civils dans les conflits armés ». À cette occasion, il compte renouveler son appel au cessez-le-feu et à l’acheminement d’une aide humanitaire renforcée vers Gaza.

Instabilité mondiale et crise démocratique

Abordant les déséquilibres à l’échelle mondiale, le ministre grec a mis en garde contre les effets délétères des inégalités croissantes sur la démocratie et l’État de droit. « Nous vivons une époque où le populisme et les démagogues prennent le dessus sur les institutions », a-t-il averti, établissant un lien entre cette instabilité, les bouleversements technologiques rapides et la mobilité accrue. Qu’il s’agisse des pandémies, du climat ou des migrations, ces défis touchent selon lui tout un chacun. Il a également pointé une crise de la coopération internationale et un effritement de la confiance dans les grandes institutions.

Il s’est néanmoins voulu optimiste, estimant que la démocratie possède un « mécanisme d’auto-correction » et affirmant que notre époque exige « des leaderships forts dans les grandes puissances et organisations internationales, pour redonner foi en l’idéal de paix et de prospérité partagée ».

« Crise d’identité politique » en Europe

Sur les dynamiques internes à l’Union européenne, Gerapetritis a reconnu que le principe d’unanimité à 27 devenait un obstacle. Il a toutefois défendu le droit de veto comme une expression légitime des intérêts nationaux. Selon lui, l’Europe traverse une « crise d’identité politique », expliquant : « Par moments, nous semblons oublier les fondements de notre union. Cela engendre des divergences et des tensions. »

Il a ajouté que le continent souffrait aujourd’hui d’un véritable « syndrome post-traumatique » à la suite de la guerre en Ukraine, concluant : « L’Europe doit retrouver sa résilience et sa raison d’être. »

Soutien maintenu à l’Ukraine

Concernant l’Ukraine, le ministre a réaffirmé l’attachement de la Grèce à la souveraineté et à l’intégrité territoriale du pays, insistant sur le respect du droit international. Il a toutefois admis que les sanctions occidentales contre la Russie n’avaient eu qu’un « succès partiel », Moscou ayant trouvé les moyens d’en atténuer les effets. Il a souligné que ces mesures économiques n’avaient pas constitué un « tournant vers la paix ».

Relations solides avec les États-Unis

Enfin, à propos des relations avec Washington, Gerapetritis a salué les investissements importants d’entreprises américaines comme Amazon, Google ou Pfizer en Grèce, qualifiant cette relation de « solide » et fondée sur un attachement commun au libre-échange. À propos des droits de douane imposés sous l’administration Trump, il a relativisé leur impact, expliquant que la Grèce n’était pas particulièrement exposée à ce type d’échanges bilatéraux. S’ils ne constituent « pas une bonne nouvelle », a-t-il admis, « il faut pourtant trouver un modus vivendi ».

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