Nouveau projet de loi anti-immigration en Grèce : durcissement des règles d’entrée et des sanctions renforcées à l’encontre des personnes réfugiées

Le ministre grec de la Migration et de l’Asile, Makis Voridis, s’apprête à présenter un nouveau projet de loi particulièrement sévère en matière d’immigration. Ce texte marque un tournant vers une politique migratoire nettement plus restrictive et punitive. Il prévoit notamment un allongement des peines de prison, une hausse des amendes, la suppression des titres de séjour pour les personnes vivant sans papiers en Grèce depuis plusieurs années, ainsi qu’un raccourcissement du délai accordé pour quitter volontairement le territoire. Il impose également l’interdiction automatique d’entrée sur le territoire pour toute personne considérée comme une menace à l’ordre public : une notion élargie pour inclure la sécurité nationale et la santé publique.
Une rhétorique musclée et un cadre juridique plus dur
Depuis son entrée en fonction, Voridis multiplie les déclarations controversées. Aujourd’hui, il met en œuvre une série de mesures ciblant directement les demandeur.euse.s d’asile et les personnes réfugiées. Selon ses propres mots :
« Un migrant en situation irrégulière, dont la demande d’asile est rejetée mais qui reste dans le pays, devra faire face à un environnement juridique bien plus strict qu’auparavant. »
Un arsenal administratif pour appliquer la politique du retour
Pour appuyer cette nouvelle approche autoritaire, un dispositif administratif sera mis en place afin de garantir l’exécution effective des politiques de retour. Voridis affirme s’inscrire dans une logique européenne plus large de durcissement.
« On a longtemps cru, à tort, que les aides sociales et les politiques d’intégration pouvaient résoudre le problème. Cette illusion est désormais révolue. L’Europe a changé de stratégie. La priorité, c’est le contrôle efficace des frontières et le retour des migrants en situation irrégulière. »
Détention prolongée et sanctions alourdies
Dans une récente interview sur la chaîne Action24, Voridis a annoncé qu’il soumettrait un projet de loi au Conseil des ministres en mai, axé sur l’extension de la détention administrative et sur un renforcement des sanctions liées à l’entrée non autorisée sur le territoire.
« L’objectif est de créer un cadre légal dissuasif face au maintien illégal sur le sol grec », a-t-il expliqué.
La durée maximale de détention administrative passera ainsi de 18 à 24 mois, ce qui signifie que des personnes pourront être retenues jusqu’à deux ans dans des centres de pré-expulsion.
Un « succès » revendiqué
Voridis se félicite de l’efficacité de la politique actuelle. Il met en avant une baisse de 27 % des flux migratoires au premier trimestre et une diminution de 12,9 % de la population dans les centres d’accueil depuis sa prise de fonction.
« Ces chiffres montrent que le contrôle est plus efficace. C’est la voie que nous allons poursuivre. »
La Grèce sur les traces du modèle danois
Comparant la Grèce au Danemark, le ministre affirme que :
« Le modèle danois est déjà largement appliqué chez nous : détention administrative, accélération des décisions d’asile, suppression des aides pour les migrants en situation irrégulière. Ce que font les Danois, nous le faisons aussi. »
Défense du rôle controversé de la Garde côtière hellénique
Interrogé sur les accusations de refoulements illégaux imputés à la Garde côtière hellénique : accusations accompagnées d’un rapport du Médiateur pointant l’inaction de hauts gradés face à des situations de mise en danger, Voridis a pris la défense de l’institution sans détour :
« La Garde côtière mène un combat difficile au quotidien. Elle arrête quasiment tous les jours des passeurs. Une grande partie des détenus sont des trafiquants de migrants. Pourtant, on ne critique jamais ceux qui mettent des vies en danger. Tout le monde vise la Garde côtière. Or, elle défend les frontières de la Grèce et de l’Europe, et elle continuera à le faire. »
Les principales mesures du projet de loi
Selon l’agence de presse grecque ANA-MPA, les dispositions suivantes figureront dans le texte :
Règles d’entrée plus strictes et durcissement des peines
- Renforcement des conditions d’entrée sur le territoire
- Allongement des peines de prison pour entrée non autorisée
- Pénalisation du maintien dans le pays après rejet de la demande d’asile
- Suppression du droit au titre de séjour pour les personnes sans papiers résidant depuis 7 ans en Grèce
Interdictions d’entrée plus longues et systématisées
En conformité avec les nouvelles règles européennes à venir en 2026, le texte prévoit :
- Interdiction d’entrée automatique pour les ressortissants de pays tiers considérés comme menaçant l’ordre public, la sécurité nationale ou la santé publique
- Allongement de la durée de l’interdiction d’entrée : de 5 à 10 ans, avec une prolongation possible de 5 ans supplémentaires
Peines alourdies pour présence non autorisée
- Peines portées à un minimum de 2 ans de prison (contre 3 mois auparavant)
- En cas de circonstances aggravantes : minimum de 3 ans (au lieu de 6 mois)
- Amendes pouvant atteindre 10 000 euros
Le maintien sur le territoire après le rejet d’une demande d’asile entraînera une peine incompressible de 3 ans de prison, une amende de 10 000 euros, sans possibilité de suspension, sauf si la personne accepte un retour volontaire. La suspension de peine ne sera activée qu’au départ effectif du territoire.
Suppression des régularisations au bout de 7 ans
La possibilité d’obtenir un titre de séjour après 7 ans de résidence sans papiers est supprimée.
Délais réduits pour les départs volontaires
- Délai de départ volontaire réduit de 25 à 14 jours
- En cas exceptionnel, prolongation réduite de 120 à 60 jours
- Mise en place d’un dispositif de surveillance électronique durant ce laps de temps, suscitant des inquiétudes quant aux libertés fondamentales
Nouvelles définitions et élargissement des pays de retour
Le projet de loi harmonise certaines notions avec le Pacte européen sur la migration et l’asile. Le « pays de retour » pourra désormais être :
- Le pays de résidence habituelle
- Un pays tiers considéré comme sûr
- Le premier pays d’asile si la demande est jugée irrecevable
Une définition élargie du « risque de fuite »
Une personne sera désormais considérée comme présentant un « risque de fuite » si elle :
- N’a pas d’adresse connue
- Change d’adresse sans le signaler aux autorités
- Refuse de se soumettre à l’identification biométrique ou autre
Prochaine étape : dépôt du projet en juin
Le texte devrait être présenté au Parlement d’ici la fin du mois de juin, après l’achèvement de la procédure législative en cours.
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